jeudi 27 mars 2008

8 Janvier 2008, jour "J" moins huit.

Il y a tout juste un an, nous étions à onze jours du départ. Fébriles et pour le moins anxieux, nous terminions nos listes, pour ce premier voyage à l'autre bout du monde, en Thaïlande.
Un mois et demi plus tard, nous rentrions, éblouis et profondément troublés par ce pays aux mille visages, au mille temples, profondément touchés et émus par ce peuple humble et courageux. Un peuple exceptionnellement accueillant et généreux, sur le visage duquel, au coin des lèvres se cache à peine, prêt à éclore et à s'épanouir, un sourire magnifique et sincère. Comme un bouquet de fleurs simples et éternelles. Comme un parfum d'humanité enfin retrouvée...
Nous fîmes à notre retour un blog aujourd'hui disparu dans les rets d'une toile trop grande pour lui, à moins qu'une araignée insatiable et vorace en ait fait son encas... Non, en fait, vous allez le trouver ici même.

Voici donc le blog-nouveau, où vous pourrez lire bientôt nos nouvelles aventures. D'ici là, il nous faut à nouveau boucler nos valises...
Là-bas déjà nous attendent nos amis de l'an passé, que nous reverrons avec joie, et les autres, encore à naitre...

Mercredi 16 Janvier

Eh bien ça y est, l'ancre est levée. Il semble que nous ayons un pied hors de notre Pichotte. Nous ne réalisons pas encore bien sûr. Cela fait des mois que nous en parlons, que nous y pensons, que nous nous préparons, que nous établissons des programmes qui changent avec les propositions de notre amie Suwanna.

Et puis l'envie de plus encore, cette incursion au Cambodge vers Angkor Wat dont l'image a baigné toute l'enfance de Lucile.

Mais nous ne sommes encore qu'en France, dans le train pour Paris. Des voisins sortent flûtes et champagne et dînent de foie gras…

Le vrai départ, c'est demain: l'avion vers la Thaïlande.

Est-ce le fait d'être à contre sens? Notre frugal repas arrosé de vin de Puget-Ville? Les odeurs de foie gras, champagne et autres agapes de nos voisins? Nous voici soudain barbouillés et nous changeons de places pour être dans le sens de la marche.

Vendredi 18 Janvier

Nous sommes partis tout à l'heure de Roissy mais c'était jeudi 17. Enfin tout à l'heure, ça fait six heures, deux films et deux repas. Et surtout mal aux fesses.

8 heures 20. Aéroport d'Abu Dhabi: immense coupole de mosaïque et de béton où traînasse une foule de touristes en escale.

Etrange impression, voici notre second voyage et, déjà, plus de surprise, plus d'émerveillement. La fatigue peut-être, ou sommes nous blasés? Non, bien sûr que non, nous sommes entre deux mondes, en transit sur cette ligne imprécise qui relie La Pichotte à Bangkok, en un instant arrêté entre le quotidien et l'aventure, qui s'étale tout de même sur quinze heures inconfortables, dans ces avions qui tirent leur fil d'un méridien à l'autre.

Et parmi tous ces visages, toutes ces femmes de noir vêtues, voilées jusqu'aux yeux, deux perles sombres à peine entrevues, deux étoiles déjà disparues. Et les hommes en blanc, cercles noirs ou grands turbans soigneusement roulés sur le crâne, rouge, bleu ou à carreaux.

Sous la mer de nuages que nous franchissons, voici enfin la Thaïlande, déjà dans l'ombre et que la nuit recouvre rapidement.

Nous n'avons pas beaucoup dormi dans la deuxième partie du voyage. Encore des repas et deux films ont accéléré le temps.

A l'aéroport de Bangkok, nous éprouvons toujours le même choc devant cette vertigineuse structure moderne où deux personnages mythologiques et gigantesques nous accueillent.

Les formalités se sont passées simplement, nous n'éprouvons plus ce sentiment voisin de la panique qui nous avait étreint l'an passé devant l'immensité du lieu, les informations écrites en thaï ou en un anglais dont nous ne sommes plus si sûrs, devant cette foule cosmopolite qui semble si bien savoir où aller, que faire: nous ne sommes plus des novices!

Après avoir marchandé le prix d'un taxi, nous suivons un rabatteur dans l'ascenseur jusqu'au troisième niveau (comprendre le deuxième, le rez-de-chaussée comptant pour un). Nous montons dans une voiture qui nous mène à notre guest house (pension). Trente-cinq kilomètres de traversée de la géante capitale "by night". Nous passons sous des arcs de triomphe fleuris et illuminés, festonnés de voiles noir et blanc, en hommage à la princesse, sœur du roi, décédée il y a quelques semaines. Nous croisons rapidement palais et temples, une fine tour de 89 étages, telle un minaret, surmontée d'un dôme multicolore.

Notre pension est à Thewet, un quartier tranquille au bord du fleuve. Nous nous frayons presque un passage dans une jungle de plantes en pots. La chambre au prix de 13€ environ est spacieuse, en bois sombre. Le lit de près de deux mètres de large nous invite à un repos longtemps différé. Nous posons nos valises et sortons manger. Trois marchands ambulants sont installés sur le trottoir. Nous choisissons un plat au hasard, copiant nos voisins. Alors que nous supposions avoir des pâtes sautées, c'est un mélange de légumes à la sauce épouvantablement épicée. On nous apporte aussi une assiette de crudités: chou chinois et un fagot de haricots verts, également crus, immangeables. Lucile s'étouffe, pleure, tousse et cale. Seule la Singha beer ressemble à ce que nous attendions

Samedi 19 Janvier

Réveil en fanfare. On frappe à la porte à 7 heures 30: Suwanna au téléphone. Il faudrait que nous soyons à Lopburi avant 11 heures. Nous avons rendez vous avec un groupe d'étudiants et leur professeur qui nous ont proposés un circuit touristique de deux jours. Impensable pour nous aujourd'hui, nous sommes vraiment épuisés.


Nous ne nous recouchons pas, douche et petit déjeuner et nous allons tranquillement faire le tour du quartier à pied. Nous suivons un khlong par de minuscules ruelles, jusqu'au fleuve Nam Chao Praya. Nous longeons des cabanes sur pilotis, jointes par des passerelles, car la marée se fait sentir à plusieurs centaines de kilomètres de la côte, tant le pays est plat.


Voici un petit chantier de réparations navales où Richard demande, par gestes, à photographier un bateau sur cales. Plus loin, sous un immense hangar, c'est l'entrepôt des barques royales richement décorées, mais fermé au public.

Par une nouvelle passerelle, nous rejoignons un parc où se nichent de très belles maisons de bois peintes en vert clair, aux pignons joliment découpés. Ce parc entoure les bâtiments de la bibliothèque nationale.

De retour à la pension, Lucile dort une petite heure et Richard s'installe dans la cour intérieure, fraîche et entourée de plantes. Sur le côté, deux petits autels avec diverses offrandes où les oiseaux font pitance. Des petits personnages y sont soigneusement installés avec des colliers de boutons de jasmin. Sur les tables basses de la terrasse, des bouquets d'orchidées.

Nous allons manger (moins de 2€) et partons au quartier commerçant de Phatunam, notre valise se révèle déjà trop petite pour nos futurs achats, et nos vêtements d'hiver ainsi que les chaussures de randonnée que Richard a emportées en catimini prennent beaucoup de place! Nous prenons donc un taxi confortable et climatisé. Puis c'est un bain de foule où nous traînons le moins possible avant notre retour à Thewet. Mais le chauffeur de taxi, qui prétend connaître l'anglais et tous les quartiers de Bangkok, doit demander deux fois sa route à la police et téléphoner à la pension, dont nous avons heureusement pris la carte, pour nous mener enfin à bon port. Nous lui accorderons une petite rallonge.

Dimanche 20 Janvier

Richard a pris un petit déjeuner à l'anglaise: thé, œufs et bacon, saucisses et tomates frites. Un peu trop…

Nous visitons le marché voisin, qui borde un khlong. Incroyable cocktail de couleurs, de fruits, de poissons, de légumes inconnus.

Sur l'autre rive du khlong, c'est le marché aux plantes, aux ombres fraîches où se devinent à peine les vendeurs. Depuis hier, journée agréable, la température a monté d'un cran, et la chaleur est lourde. Dans le parc de Dusit, où nous comptions pique niquer tranquillement, des centaines d'étudiants, en tenue de cérémonie à la mode anglaise, avec leur coiffe carrée et leur toge, occupent tentes et pelouses avec amis et parents. Pas le moindre coin d'ombre oublié par cette foule bigarrée et joyeuse.

Un peu fatigués nous retournons à la pension, espérant y trouver un peu de fraîcheur. Lucile ne se sent pas bien: elle a pris froid hier soir au cyber café d'où nous avons envoyé notre premier message vers la France.

Nous avons hâte de partir tant nous sommes incommodés par cette "chaleur hivernale"! Ici, le moindre mouvement déclenche des ruisseaux de sueur. Lucile a mal à la gorge et, fiévreuse, est incapable du moindre effort. Elle vient de terminer son livre, "les racontars arctiques" de Jorn Riel et ça la fait rêver…

Nous décidons de déjeuner à la guest house. Près de nous vient s'asseoir une jeune femme qui déguste une assiette de fruits recouverts de yaourt. Elle est française et vient ici en habituée pour la cinquième année. Elle nous conseille le thaï "yellow curry"qui nous arrive bientôt, un véritable délice: poulet et crevettes baignant dans une sauce à base de lait de coco avec citronnelle et piment, petits légumes et herbes inconnues, parfumé et subtil à la fois.

C'est ainsi que commença le yellow caca…

Nous avons rendez vous ce soir avec Suwanna,

devant un hôpital, près du monument de la Victoire. Nous devons partir ensemble à Lopburi en minibus.

Le taxi nous dépose sans encombre sur cette place immense dominée par une sorte d'obélisque. Mais où est donc cet hôpital devant lequel on nous attend? Ici c'est un fourmillement de voitures, bus, taxis, piétons par milliers. Comment retrouver Suwanna? Le portable! Mais nous tombons sur la messagerie. Richard s'écrie: "Je le sens mal, ce n'est pas aujourd'hui qu'on va se retrouver!" Au deuxième appel, elle répond. Mais dans le bruit assourdissant, on ne comprend pas où aller. Richard passe le téléphone au premier passant qui écoute, opine longuement, cherche et trouve une jeune fille parlant anglais pour nous indiquer où nous rendre, laquelle note en thaï et en anglais le nom du fameux hôpital. "Kapun kap, kapun kaaaa".

Munis de nos lourds bagages, nous devons nous hisser sur la passerelle qui enjambe les artères grouillantes. Et tout à coup: "Lucile, Richard!" Miracle, c'est elle qui nous a retrouvés, aussi improbables que semblaient ces retrouvailles. Fin de panique.

Le trajet en minibus, d'une heure et demie, nous mène à Lopburi à la nuit tombée. Un cousin de notre amie nous attend à la gare et nous voiture à l'hôtel. Nous allons ensuite dîner ensemble au marché de nuit. Suwanna nous explique un peu la cuisine thaïe.

Son père, Chinois, est cuisinier et lui a communiqué son goût de la gastronomie. Nous goûtons la fleur de bananier assez semblable à l'artichaut par le parfum, la consistance et l'âpreté, puis au lait de soja et enfin aux crêpes dont nous avions gardé un si bon souvenir: pâte élastique étirée d'une main experte, à base de farine de blé et d'huile de lotus. Elles sont ensuite recouvertes de sucre et de lait concentré.

Lundi 21 Janvier

Ce matin, Lucile prend un cachet pour faire tomber la fièvre. On déjeune à la salle à manger de l'hôtel, le personnel est toujours le même, et pareilles aussi les difficultés pour commander le petit déjeuner. De guerre lasse on coupe en deux: à Richard saucisses et lard frits et à Lucile toasts beurre et confiture.

Nous voilà prêts pour visiter ce que nous n'avions pas vu l'année dernière, à côté de la gare, le Wat Phra Si Ratana Mahathat. Nous sommes seuls, tout est calme. Nous avons enfin l'impression d'être en Thaïlande, devant ces merveilleuses ruines khmères, seulement visitées par les oiseaux.

Richard parcourt tout le lieu, ne voulant rien manquer, tandis que je me repose, m'imprégnant de cette sérénité. Une brise légère me caresse tandis que j'écris à l'ombre d'un magnifique édifice. Bien qu'abîmé, il garde sa structure initiale. Il est rouge, fait d'une pierre alvéolée de trous, la latérite, pierre volcanique et recouverte en partie de stuc qui décore la façade de personnages et de dessins géométriques complexes entre de grandes surfaces nues.

Nous rentrons à l'hôtel pour une douche rapide, la chaleur est déjà forte. Nous retrouvons Suwanna pour déjeuner à la cantine de l'Université: une salle de 60 mètres sur 30 environ, au plafond, 70 ventilateurs (Richard les a comptés!) brassent un air tiède. Combien de centaines d'étudiants? Des moineaux voltigent d'une table à l'autre. Nous sommes à la table des professeurs qui nous saluent d'un "waï", mains jointes devant le visage en s'inclinant légèrement.

On nous présente ensuite la directrice du centre culturel de l'Université, qui, elle aussi, parle français. Puis nous rentrons nous reposer à l'hôtel.

Vers seize heures, nous partons chez Suwanna, dans la voiture d'une collègue, Tukata, c'est-à-dire "Poupée". Les Thaïlandais ont l'habitude de porter un surnom en plus de leur prénom. Ainsi Suwanna est appelée Nana par ses amis et nous la nommerons ainsi. Il y a aussi des appellations différentes selon l'âge des interlocuteurs. Nana est appelée soit "grande sœur" (pi naa), soit "petite sœur" (non naa) par ses cousins, neveux, nièces et autres parents.

Tukata et Nana habitent toutes deux des logements de fonction, un peu à l'extérieur de la ville. Ce sont de petites maisons traditionnelles en bois, sur pilotis. Les ouvertures, des moustiquaires, des grilles et des volets de bois, pas de vitres. L'intérieur est une fournaise, et pourtant nous sommes en hiver! Nana ouvre tout grand les volets en affirmant que ce soir il fera frais.

Nous visitons la maison. La salle de bain est étonnante: sol carrelé et en pente vers une bonde; un bassin en ciment, alimenté d'eau par le goutte à goutte d'un robinet, où flotte deux cuvettes en plastique. L'une pour s'arroser et se doucher (il est de tradition que les hôtes, ayant laissé leur chaussures à l'entrée de la maison, viennent se rafraîchir et se laver les pieds) l'autre servant de chasse d'eau à un WC de porcelaine blanche à 30 centimètres du sol

La cuisine: sur une simple table de pique nique, un wok électrique, qu'on repose au sol après utilisation; un évier surmonté d'un appareillage de trois bouteilles métalliques chromées qui constituent le filtre à eau.

Dans une pièce attenante, où nous mangerons car nous sommes invités, l'autocuiseur pour le riz est posé par terre, dans un coin C'est là que Chit, le cousin de Nana, pile en farine du riz grillé sans huile pour saupoudrer une salade.

Mais revenons à la maison. Nous apercevons la chambre avec son lit, un simple matelas sur le plancher garni d'une énorme peluche rose, la télé et une armoire en bois. Puis une pièce qui sert de réserve, emplie de cartons, de dossiers, de cahiers sur des étagères, des bouteilles d'eau. Partout sur les murs, des clous servent à accrocher, à suspendre, à ranger. Pas de meubles.

Ici nous sommes frappés par cet aménagement réduit à l'essentiel, et nous pensons à nos maisons occidentales débordantes et surchargées de bibelots, napperons, et autres choses superflues.

Nous descendons au jardin. Bananiers, papayers, et de nombreux pieds d'orchidées en pots et d'autres accrochées de leurs racines aériennes au tronc d'un immense manguier, qu'elles parasitent. Nana adore les plantes odorantes et elle en a mis partout. Nous reconnaissons le jasmin, mais d'autres nous sont inconnues. Sans doute des agrumes au parfum sucré et citronné, comme la bergamote, beaucoup utilisée en cuisine. Chit, qui sait tout faire de ses mains, a construit à sa cousine une petite fontaine où tourne un moulin en bambou. Derrière la maison une balancelle où conduit un chemin sinueux en noix de coco. Il faut se déchausser et marcher dessus pour masser ses pieds. Si on a mal, c'est que le massage était nécessaire, et nous avons eu vraiment mal…

Les pilotis de béton qui soutiennent la maison sont hauts de deux mètres. A la saison des pluies, les inondations sont fréquentes. Avant de rentrer chez soi, il est indispensable de frapper sur le plancher pour faire fuir les serpents qui peuvent se réfugier dans la maison, nous explique Nana.

Chit arrive et nous conduit au marché. Celui-ci est exclusivement réservé à la nourriture, fruits et légumes, viandes diverses, poissons et épices. Notre amie nous précise quel est ce légume, ce fruit, cette préparation dont elle ignore souvent le nom français. Fleurs de bananiers, plantes aquatiques nombreuses, pâtes de piment et de curry, mini aubergines vertes ou violettes. Et puis encore le poulet dont on ne jette rien. Par exemple en tas, des sternums (mais doit on dire sterna?) blancs et bien grattés, morceaux de cartilage en forme de flèche, sont vendus au poids, crus ou en beignets épicés que l'on nous propose avec un sourire amusé. Peu goûteux mais craquant. Nana en prend une bonne poignée qui cuiront doucement dans le Tom Ka Kaï qu'elle prépare dès notre retour. Ce plat, à base de lait de coco, comporte de nombreux ingrédients: citronnelle en branche, rhizome de galanga, pousses sommitales de cocotier, bergamote en feuilles émincées, champignons étranges, pousses de bambou, tomates, petits morceaux de poulet, sans oublier les sternums, carottes en rondelles, épluchées avec un petit outil qui leur donne un air de roues dentées, sel et piment, bien sûr.

Pendant que tout cela mijote en dégageant rapidement une odeur fantastique, nos hôtes nous préparent une "salade". Il s'agit de porc mariné et cuit au barbecue, coupé en fines tranches, saupoudré de piment, de poudre de riz grillé. On y ajoute des feuilles de menthe et du jus de citron vert, c'est le Nam Tok Mu. Et puis encore un troisième plat: ail pilé dans sa gousse et sauté à l'huile de grain de riz avec pousses de cocotier coupées menu, rondelles de carottes, une poignée de coriandre en feuilles et de cébettes hachées. On n'utilise jamais de couteau à table, et tout est servi préalablement découpé.

Nana est réputée comme cuisinière exceptionnelle, elle possède un savoir-faire, dit-elle, qui lui permettrait de se débrouiller même en France avec les ingrédients locaux.

Il faut savoir que le porc, c'est Mu; le poulet, Kaï; les crevettes, Kum; la soupe thaï, Tom; le lait de noix de coco, Ka. Donc, un Tom Yam Kaï est une soupe sans coco. Nous en déduisons que Yam doit désigner une préparation à l'eau.

Et surtout, surtout, à savoir, cette petite chose très importante: Maï Saï Prik, (roulez bien le "r") et qui veut dire: SANS PIMENT.

Mardi 22 Janvier

Nous avons rendez vous ce matin avec les étudiantes de français. Deux d'entre elles doivent venir nous chercher à l'hôtel. Nana ne leur a pas précisé ce qu'elles doivent "rapporter" et, amusés, nous les voyons demander à la réception le colis pour leur professeur. Confusion, balbutiements, elles ont grand mal à se débrouiller dans notre langue et ne peuvent répondre à nos questions. Timides, elles nous précèdent en silence jusqu'à la classe où un grand éclat de rire nous accueille. Là, nous voici répétiteurs pour quinze élèves qui, tour à tour, lisent un paragraphe de "Bienvenue à Lopburi", le manuel de français écrit par Nana pour les étudiants en formation tourisme. Ils interprètent ensuite un petit sketch sous forme de dialogue. Nous retrouvons toujours les mêmes difficultés de prononciation que nous avions remarquées l'an passé. Un seul garçon, dans cette classe, domine nettement le reste des élèves.

Le cours terminé, Nana nous promène d'un bureau à l'autre pour nous faire rencontrer quelques collègues, dont un Américain de Philadelphie qui a un contrat de travail d'un an.

Nous retournons manger dans l'immense cantine qui, en fait, est bordée de petites boutiques indépendantes où nous achetons les plats qui nous tentent, de la même façon qu'au marché.

Un peu plus tard, une jeune femme, Dao, troisième chauffeur de notre amie, professeur d'anglais à l'Université, nous mène à la gare réserver nos billets pour Phitsanulok. Pour les remercier nous les invitons à manger ce soir dans un restaurant de leur choix.

En attendant l'heure du repas, nous allons nous promener dans un immense marché qui tient plus de la foire et du marché aux puces avec ses camelots divers. Nous regardons tout avec la naïve fraîcheur de touristes aux yeux écarquillés: le coin des animaux, petits chiots en cage, shampouinés et brushés, pas plus grands que la main, poissons exotiques tout petits (un concentré de beauté et de couleurs) qui tournent dans des sacs plastiques gonflés.

Sur chaque marché que nous avons parcouru, notre amie achète des guirlandes de boutons de jasmin rehaussées de fleurs jaunes, offrandes destinées au temple. Chaque matin, elle se lève à cinq heures, prépare un repas chaud qu'elle porte un peu plus tard au moine qui se présente à l'entrée de la résidence gardée où elle demeure.

Au restaurant, il y a peu de clients. Chaque table est abritée d'un toit de feuillage. Nos amies établissent notre menu en fonction de nos goûts et des spécialités qu'elles veulent nous faire connaître. Il faut dire que parmi les deux pages du menu, seules quelques lignes sont en anglais. Plats thaïs, donc: poisson rubis grillé, escargots et pousses de bambous, beignets de pâte de poisson, porc haché sauté, légumes verts et riz blanc. Tout est délicieux mais trop pimenté si l'on en croit les larmes de Lucile et la toux de Richard.

Au cours du repas, un chien souffrant autant que nous de la chaleur, a trouvé la solution. Il vient s'asseoir dans le petit bassin entre les tables. La serveuse nous raconte qu'il fut volé la nuit du nouvel an. Quelques jours plus tard, on le proposa au propriétaire qui, le reconnaissant à ses cinq taches sur le front, le racheta aussitôt. On ne sait pas ce qu'il advint du voleur.

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